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Photo du rédacteurPhilippe

Compagnon des bois

Dernière mise à jour : 24 janv. 2020

L'air est vif mais l'ascension de l'abrupt chemin forestier réchauffe mon corps encore engourdi par l'horaire matinal. Les premières lueurs du jour m'accordent une bonne visibilité à travers le sous bois de la forêt d' épicéa. J'espère observer le cerf avec ses biches. Le temps est clair, je devrais bénéficier d'une belle lumière. Le bruit des feuilles automnales, sèches et craquantes sous mes pas, ralentit ma progression. Pour rester discret, je suis contraint de m'arrêter fréquemment, toutes les trois ou quatre enjambées pendant une ou deux secondes. Ces temps de pause me donnent l'occasion de percevoir la caresse de l'air et d' écouter les murmures de la forêt. L'air froid descend le long de la ravine, où cascade le ruisselet, vers la plaine plus chaude. Je suis à bon vent, c' est bien !


Lors de coup de vent, de multiples feuilles d'érables s'élancent entre les troncs, comme autant de parachutes dorés, pour venir compléter le patchwork tapissant l'humus. Leurs chocs contre les branches et leur réception au sol mimeraient, à s'y méprendre, la fuite d'un animal surpris. Cela m'arrange bien. Mes pas se mêlent à leurs bavardages et j'espère ainsi faire partie de la symphonie. Tout est si calme.

Alors que j'aborde un lacet, contournant le tronc massif d'un vieil épicéa, voici qu'un drôle de bruit chatouille mes oreilles. Comme le cliquetis d' un clavier, sous les doigts d'une opératrice de saisie stressée par l'ampleur de la tâche. Cela vient d' en haut, au dessus de moi. Levant les yeux j' aperçois une touffe de poils, sombre, grimpant à vive allure en agrippant l'écorce du résineux. Un instant elle stoppe sa course folle pour m'apostropher de toutes sortes de petits claquements, comme sur un ton de reproche. Cet écureuil ne m'avait pas entendu venir. Je devais être tout près, lorsque ma silhouette l' a effrayé.

Mais le voici qui repart de plus belle, sautant d'une branche à l'autre. Je le perds de vue, puis ses petits cris - il ne décolère pas - me guident vers un autre épicéa, quelques mètres plus loin, puis, vers un noisetier, puis ... il disparaît !


Un instant il stoppe sa course folle pour m'apostropher ...

J'aime observer cet animal. Il est si curieux et si agile. Lorsqu'il n'est pas surpris au point de paniquer, il prend volontiers le temps de m'observer, depuis la base d' une branche, ou suspendu à l'écorce du tronc, ne laissant dépasser que la tête. Lorsque je suis en affût plusieurs heures, il peut aller et venir jetant un œil en ma direction, de temps en temps. Il prend alors confiance. Il se détend, fait un brin de toilette puis retourne à ses occupations comme stocker quelques noisettes ou décortiquer un cône d'épicéa. C'est d'ailleurs parfois seulement la chute des écailles, qui révèle sa présence, tant il sait être discret.


Il se détend, fait un brin de toilette

C'est amusant de voir les courses-poursuites de deux individus, remontant le long des arbres en spirale, bondissant de branche en branche, d'un arbre à l'autre. Leur vivacité est vraiment surprenante.

Cet automne, l'écureuil roux a rompu ma solitude chaque jour, et il fut une bien agréable compagnie.

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